Les 5 principes politiques de l’IDPC concernant les drogues : Principe politique n°4

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4/ Les efforts de réduction de la demande de drogues ne doivent pas se concentrer sur la punition des consommateurs

Le Rapport mondial sur les drogues de 2006 estimait à 200 millions le nombre d’usagers de drogues illégales, soit environ 5% de la population adulte. Des études disponibles montrent que trois à quatre fois plus de personnes auront utilisé des drogues illégales à un moment de leur vie. Or, même ces chiffres sont probablement des sous-estimations du fait des limites du système de collecte des données dans de nombreux pays. Compte tenu de cette proportion d’usage de drogues illégales (et de la pratique répandue du détournement de médicament vendu sur ordonnance et de substances psychoactives non couvertes par les conventions internationales), toute tentative de criminaliser et de prendre des mesures de répression contre ces nombreux usagers ne constitue pas une stratégie pratique. Dans les faits, la plupart des gouvernements font des déclarations fortes contre l’usage de drogues, mais ne sont capables de prendre des mesures que contre une petite proportion de consommateurs seulement. Identifier des mesures et les appliquer contre tous les usagers de drogues interdites exigerait des moyens dont même les nations les plus riches ne disposent pas, impliquerait probablement de nombreuses violations des droits de humains et aurait de graves conséquences sociales. Ce  » vide de coercition compromet l’objectif clé de la répression, à savoir dissuader les usagers potentiels en leur faisant craindre l’arrestation et la sanction. En effet, les usagers réguliers et potentiels savent que le risque d’être arrêté est minime. Les études portant sur les raisons pour lesquelles des individus choisissent d’utiliser, ou de ne pas utiliser, de drogues montrent toutes que le risque d’être arrêté et puni est un facteur marginal en regard des facteurs culturels, sociaux ou émotionnels. En outre, des études portant sur les liens entre les taux de répression et de prévalence de l’usage de drogues montrent qu’il n’y a pas de corrélation claire entre ces deux éléments : certains pays ayant un fort taux d’arrestation et d’infliction de peines enregistrent une prévalence d’usage élevée, tandis que dans certains pays ayant une législation plus libérale en la matière, la prévalence est faible.

Compte tenu de l’impact limité sur les objectifs de répression et de sanction généralisée des usagers, il est difficile de comprendre pourquoi ces approches sont toujours encouragées, puisqu’elles ont d’importants effets secondaires négatifs :

  • Le recours généralisé aux contrôles de police, à la poursuite et à la sanction des usagers de drogues pèse lourdement sur les dépenses publiques, et dans beaucoup de pays, c’est un important facteur d' » engorgement des systèmes judiciaire et carcéral.

  • La répression des usagers de drogue est toujours inégale. Les usagers pauvres, vivant en ville et issus de minorités ethniques sont généralement la cible des arrestations, soit parce qu’ils sont plus visibles, soit à cause d’un parti-pris institutionnel.

  • Les efforts visant à combler le  » vide de coercition entraînent souvent les autorités dans des pratiques discutables en matière de droits humains, telles que la suppression de la présomption d’innoncence ou l’atteinte à la vie privée.

  • Dans la mesure où l’emprisonnement est utilisé comme une sanction, cela revient à concentrer de nombreux usagers de drogue dans un environnement clos, ce qui crée les conditions d’une pression plus grande sur les non-usagers et d’une propagation des transmissions de maladies infectieuses liées à l’usage de drogues.

Si nos objectifs sont de réduire les risques liés à l’usage des drogues, alors nos activités et nos ressources de réduction de la demande doivent en priorité aider les usagers réguliers et potentiels à comprendre les risques associés à la consommation de drogues, et faciliter l’accès aux services de conseil et de réadaptation pour les personnes qui en ont besoin. Concrètement, cela se traduit par une large et honnête diffusion d’informations et de programmes d’éducation portant sur les propriétés et les risques des drogues, un accès généralisé à des traitements efficaces pour les personnes dépendantes, et par-dessus tout, des programmes d’intégration sociale pour réduire la pauvreté et l’aliénation sociale, si souvent à l’origine du problème des drogues.

Date première publication :
04/07/2010

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