Comment s’est créée L’association ?
L’association SIDA Paroles a été créée en 1993 à Nanterre dans les Hauts de Seine à l ‘issue des travaux du COPITOX, réseau local mis en place à l’initiative de la municipalité pour traiter les questions de drogues. A cette époque le SIDA battait son plein dans les banlieues, la réduction des risques était naissante et l’urgence était d’enrayer l’épidémie notamment auprès des usagers de drogues qui représentaient 30 à 40% des personnes atteintes. Le nom même de l’association l’inscrit dans cette histoire de l’épidémie de SIDA.
C’est d’abord un programme d’échange de seringues qui est proposé aux usagers de la boucle nord du 92 et plus précisément sur les communes de Nanterre, Colombes, Villeneuve la Garenne Asnières et Genevilliers
Un bus de type transport en commun mis à disposition par la mairie de Nanterre sert de base mobile pour entrer en contact avec les usagers de drogues du territoire. Il est complété par un travail de rue et comme souvent à l’époque par des actions d’information en milieu scolaire.
En 1999 SIDA Paroles ouvre la boutique pour permettre un relais au bus et au travail de rue. Dans le même temps l’association développe un programme aux bois de Boulogne auprès des travailleurs du sexe.
En 2002 l’association affirme et recentre ses actions sur la réduction des risques liés aux usages de drogues dans un contexte qui a évolué. Les bus passent mal dans les quartiers déjà très désignés et il faut renforcer le travail de rue par nature plus discret. A Boulogne, faute de financement, le programme cesse. L’épidémie de VHC chevauche désormais celle du VIH et les jeunes usagers ont d’autres pratiques c’est vers ce public que nous chercherons à nous tourner plutôt que de continuer les actions en milieu scolaire que d’autres opérateurs font très bien.
La boutique tient bon sa vocation d’accueil, chacun est d’abord accueillant, mais elle se réorganise aussi autour de trois pôles destinés à renforcer la palette d’actions proposées aux usagers.
Un pôle sanitaire pour améliorer l’accès aux soins dans tous les domaines (VIH, VHC, traitement de la dépendance, soins psychiatriques…). Un pôle social parce que les questions de ressources, de logement, d’ouverture ou de rétablissement de droits, d’aide juridique, d’urgence, sont le lot quotidien. Un pôle psychologique parce qu’il y a lieu de rétablir cette dimension du prendre soin et de proposer du soutien. C’est entre autre de là que se développeront les actions en milieu carcéral, » on ne laisse pas tomber les personnes. Depuis 2004, la boutique ouvre ses portes le samedi sur la période d’hiver (novembre – avril) pour permettre un accueil des nombreuses personnes sans domicile que nous recevons.
Le » PES devient » Programmes Mobiles englobant les activités PES sur les jours de semaine et le dimanche, le travail de rue, le travail avec les pharmaciens et » autour des distribox. Pendant que les actions d’échange de seringues continuent, nous ouvrons pour compléter ces programmes mobiles, un programme de réduction des risques destinée aux jeunes consommateurs à la faculté de Nanterre. Elle est devenue aujourd’hui une consultations jeunes consommateurs, non pas limitée aux seuls consommateurs de cannabis mais à l’ensemble des consommateurs ou leurs proches et à l’ensemble des étudiants qui peuvent avoir des questions de sexualité telles que les IST, l’utilisation des moyens de contraception et de protection ect… Cette action fait suite à nos collaborations avec la mission rave de Médecins Du Monde qui intervient en milieu festif et nous recherchons le transfert en ville de ce que nous avons appris » en teuf
Enfin le 1er janvier 2006, SIDA Paroles est devenue un CAARUD qui couvre l’ensemble des missions à remplir.
Quels sont les projets actuels ?
Plusieurs projets sont actuellement en cours de développement ou en négociation.
Renforcement des actions en milieu carcéral
Avec le soutien de SIDACTION nous avons pu développer ce volet d’actions en milieu carcéral d’abord initiées auprès de détenus masculin sur la maison d’arrêt de Nanterre et sur le centre de détention Osny avec le soutien du SPIP et de l’UCSA. Depuis 2007, nous intervenons en complément sur le centre de détention pour femmes de Versailles, le centre de détention de Fleury Mérogis (homme et femmes) et celui de Bois d’Arcy. En fonctions des lieux nous proposons soit des actions collectives d’information (RDR, VIH, VHC), soit un accompagnement des usagers de SIDA Paroles qui connaissent un épisode d’incarcération, soit en termes d’entretien individuel RDR y compris auprès d’usagers non connus par l’association antérieurement.
Projet croix Rouge
Il s’agit là de proposer aux usagers de drogues une formation aux premiers secours (AFPS) adaptée à la fois en termes de contenus (conduite en cas d’overdose ou d’accidents potentiellement contaminants par exemple) et de rythme (plusieurs séquences de 2 heures en après midi). Aprè deux éditions avec le concours de la Croix Rouge de Colombes, notre coordinatrice santé c’est elle même formée pour devenir monitrice Croix Rouge et permettre une validation de l’AFPS. Nous souhaitons à termes proposer cette actions à l’ensemble des CAARUD de la région parisienne et pourquoi pas aux CSAPA…
Ouverture d’un accueil spécifiques aux femmes
Les femmes représente 10 à 15 % de notre file active ce qui nous semble peu. Proposons nous des services suffisamment adaptés aux femmes ? N’y a t il pas des interactions entre les hommes et les femmes (commerce sexuel ou lié aux drogues ?) de la boutique qui les empêchent de la fréquenter tranquillement ? Cette première série de question nous a conduit avec les femmes de la boutique à la rénovation des sanitaires avec pour objectif de sanctuariser un lieu qui leu soit réservé. Dans la poursuite de cette réflexion, nous expérimentons l’ouverture d’un créneau spécifique aux femmes, une fois par semaine, le jeudi matin.
Développement d’un T’chat contact
Pour poursuivre les actions de la consultations jeunes consommateurs et développer notre surface de contact avec les jeunes consommateurs, nous expérimentons le recours au T’chat. De notre expérience, nous avons pu constater que les jeunes consommateurs sont souvent les moins bien informés des risques liés aux consommations de drogues. La prévalence au VHC dans cette populations en est une illustration et pour ce qui concernent les jeunes injecteurs, les contaminations ont le plus souvent lieu. très tôt dans l’expérience d’injection. Ce n’est par ailleurs pas forcément un public qui vit une impérieux besoin de consulter et la question est donc de savoir comment et où entrer en contact avec eux en dehors du festif pour tenter notamment d’infléchir les contaminations au VHC.
L’éducation à l’injection à moindre risque
Toujours suite à nos actions avec la mission rave de Médecins du Monde en milieu festif où nous avons expérimenté un accompagnement à l’injection à moindre risque, nous recherchons les moyens de faire ce travail en ville non plus quinze jours par ans mais toute l’année. Ce programme que nous intitulons » programme d’éducation à l’injection à moindre risque est proposé sous forme d’accompagnement individuel avec pour objectif à termes de trouver des moyens plus efficaces de lutte contre l’hépatite C qui est une préoccupation majeure. Si pour le VIH le slogan » un shoot, une pompe a très bien fonctionné, les message concernant le VHC sont plus complexes et les gestes à maîtriser plus nombreux. C’est parce que nous avons constaté un décalage entre ce qui se dit et ce qui se fait pour l’avoir entendu et vu, et parce que nous avons constater des changements
possibles rapidement que nous souhaitons développer ce programme. Nous en sommes encore au stade des discussions avec nos interlocuteurs publics (DGS, DRASSIF, DDASS 92, la MILDT, nos partenaires locaux) pour démarrer une première phase. Nous espérons ensuite pouvoir développer cette offre de service à la boutique (ou » comment passer des chiottes à l’infirmerie c’est beaucoup plus safe), à partir d’un véhicule banalisé en circulation sur notre territoire d’intervention, au domicile des personnes ou en squat. Nous souhaitons évidement évaluer cette expérience avec beaucoup d’attention de façon à ce qu’elle permette de sortir de l’impasse des salle de shoot qui pour l’instant n’ont ouvert leur portes nul part. Ce programme en projet représente pour nous une alternative qui s’est montrée très intéressante en termes d’éducation à la santé, de RDR et d’accompagnement individuel.
Comment on voit l’avenir ?
Sur la forme…
Le VHC, le VHC, le VHC…
Alors que l’épidémie de SIDA n’est pas encore sous contrôle malgré les résultat spectaculaires de la RDR avec les usagers de drogues, le VHC est manifestement un problème grave de santé publique qui est sous traité, sous estimé, d’autant plus qu’il est relativement silencieux et en tout cas moins visible que le VIH. Moins visible en l’absence de maladies opportunistes par exemples, et moins visible en termes de militantisme tel qu’il a été porté dans la lutte contre le SIDA que ce soit par les personnes elles mêmes où par les associations qui s’y sont coltiné.
L’espoir de déboucher avec l’éducation à l’injection à moindre risque est alors une perspective forte pour SIDA Paroles parce qu’elle représente des moyens plus concrets pour combattre les contaminations. Mais il faudrait aussi proposer d’autres équipements qui permette de soigner les personnes atteintes, notamment des équipements d’accueil avec hébergement à seuil adapté qui manquent aujourd’hui pour permettre un parcours de soins aux personnes les plus marginalisées, voire les moins dociles, et alors que » les questions sociales restent très preignantes parmi les personnes que nous accueillons…
Dans la même perspective, comment réellement contacter les jeunes injecteurs en dehors des évènements festifs, notamment pour intervenir le plus tôt possible en tout cas en amont des contaminations ?
La question carcérale nous préoccupe beaucoup. Certes les choses ont progressé même s’il reste à faire pour améliorer l’accès aux soins et la préparation des sortie par exemple. Mais surtout le durcissement du traitement pénal de la question des drogues augure mal de l’avenir d’un certain nombre d’usagers que nous accompagnons. Le durcissement en matière de récidive commence à se faire sentir et les peines s’allongent…
Enfin la question des échéances à venir comme la fin de la période de conformité à trois ans (2006 – 2008), la mise en place de l’évaluation interne (2010), la conclusions de l’évaluation externe (2012), nous attendent. Bref, si devenir CAARUD n’a pas été simple, le rester nécessite encore de nombreux travaux d’adaptation et d’approfondissement, même si, objectivement pour SIDA Paroles, le passage en CAARUD n’a pas posé de grosses difficultés.